FIL DE TRIBUNES

Sport : la #parité pour la gouvernance

Dominique Crochu

FCV Garcons filles mixite

. La parité : le partage du pouvoir à égalité entre les hommes et les femmes des instances de sport est un véritable objectif pour mener une politique générale, une vision globale, une stratégie inclusive dans la gestion du sport. Et non pas en fonction de raisonnement séquentiel, d’événements ponctuels selon les cas et les opportunités.

Le sport est un phénomène universel dans le temps et dans l’espace humain.

Le sport n’est pas masculin, le sport n’est pas féminin. 

Pendant des siècles, la pratique du sport a été réservée aux hommes. Les femmes n’avaient pas leur place dans ce monde. L’opinion du public a été largement influencée et même renforcée par les déclarations -en 1912- de Pierre de Coubertin au sujet de l’éventuelle participation des femmes aux JO qui se voulait selon lui « impratique, inintéressante, inesthétique, et incorrecte ». Quand on sait l’énorme aura qu’avait le rénovateur des Jeux Olympiques des temps modernes, on peut raisonnablement penser que ses positions dures ont pesé lourd contre les femmes qui souhaitaient s’adonner à des activités physiques. Ce poids était un véritable obstacle aussi pour l’accès aux responsabilités à des rôles techniques sur les terrains (coach, arbitre…) ainsi qu’à des fonctions de dirigeantes (élection dans les comités, cooptation dans les instances…).

Sans les diverses Lois portées par l’Etat obligeant les comités sportifs à intégrer une femme dans leur organe de décision, on peut penser raisonnablement qu’il y en aurait encore beaucoup moins qu’actuellement voire pas du tout. En 1985, l’élection d’une femme est devenue obligatoire -au niveau des fédérations sportives et leurs entités locales- dans la mesure où des féminines étaient licenciées dans le sport de ladite fédération. De façon claire, le rôle de la nouvelle élue était de représenter ces pratiquantes et de développer uniquement cette activité pour les femmes. Les réticences étaient fortes de toute part. Que ce soit sur les terrains ou dans les différentes sphères du sport.

 

Pourquoi il faut proscrire le mot, l’adjectif féminin ? ou au féminin ? 

Celui-ci a, globalement, les mêmes règles, les mêmes dimensions de terrains…pour les hommes et les femmes. Pourtant, peu à peu, s’est installée une sémantique particulière dans le public, les médias…y compris les athlètes. Une appellation genrée pour la pratique des femmes. Concrètement, la référence au sport sous-entend le masculin. Et pour les femmes sont apparues étrangement les expressions « sport féminin » ou « sport au féminin » ? La sous-catégorie était créée alors que le sport n’a pas de sexe ! Partout et tout le temps, cette segmentation est devenue un leitmotiv presque une marque, un slogan comme « séminaire sur le sport féminin », tables rondes sur le « sport au féminin », « États Généraux du sport féminin », « les rendez-vous du sport au féminin »….

En ajoutant au sport l’adjectif « féminin » :
. La réflexion s’installe de façon prioritaire sur la pratique sportive des femmes (on le rappelle celle-ci n’a rien de spécifique) ; les fédérations étant intéressées par l’augmentation du nombre total de licenciés,
. La vision globale du sport se trouve rétrécie,
. La fabrique sectorielle d’un «féminin » empêche la réflexion générale de toute la place des femmes dans l’univers du sport au même titre que celle des hommes,
. La scission via les slogans « féminin » assigne les femmes à certains rôles et crée une situation défavorable à la réalisation de diversité sur l’ensemble des actions,
. Le cloisonnement favorise un entre-soi de « spécialistes » composé de très très peu d’hommes et beaucoup de femmes pour « traiter ladite question ».

A réflexion, n’assiste-t-on pas depuis des années à une fabrication d’un autre genre de stéréotypes ?
. L’injonction de classification « féminin » versus le mot neutre « sport » bloque, de fait, une volonté politique de toutes les mixités pleines et entières à tous les niveaux,
. La vision parcellaire et même genrée du sport est un frein certain à la mixité.

L’avenir des organisations sportives est à ouvrir sur d’autres bases que celles qui ont présidé depuis plusieurs décennies.

Par mixités, il nous apparaît que l’horizon se regarde à 360 degrés pour tout s’autoriser,  à tous les niveaux, et créer enfin des instances ouvertes et vraiment représentatives de la population.

– Femmes, hommes, multigénérations, toutes les diversités y compris le handicap, avec bien entendu la parité hommes / femmes. Enfin casser les codes des rôles historiques semblant taillés dans le marbre. La création de binômes mixtes -par exemple- pour gérer les dossiers dans les instances sportives serait déjà une nouvelle façon de gouverner, fonctionner.

– Ouvrir toutes les entités sportives à des personnes (hommes et femmes) de la société civile venant d’autres mondes comme par exemple le numérique, la culture, l’éducation…

Les instances sportives ont toujours eu tendance à bloquer (par leurs règlements) toute intrusion d’autres personnes que celles du monde sportif. L’entre-soi amène une sclérose, un immobilisme dans la gouvernance qui est largement reconnue et soulignée notamment -tous les quatre ans- au moment des élections des comités exécutifs du Comité National Olympique, des fédérations et de leurs instances décentralisées. On peut imaginer que des personnes de la « société civile » non issues de la pyramide interne du sport pourraient accéder à la gouvernance. De plus, la limitation des mandats pour les présidents(tes) est une nécessité. Quel sens d’avoir une même personne pendant plusieurs décennies à la tête d’une instance sportive ?
Installer la mixité plurielle dans tous ses états et à tous les étages, tous les niveaux.
Une nouvelle politique sportive peut se préparer en partant d’une page blanche brisant les codes de fonctionnement actuels et ouvrant réellement cet univers. C’est un enjeu majeur pour les prochaines décennies.
Autrement, il est évident -dans quelques années- que le « féminin » sera devenu le verrou de la mixité, de la parité, de l’égalité femmes-hommes.

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Photo EllesFontDuVélo